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Dunkerque, laboratoire de la décarbonation industrielle
La région autour de Dunkerque va se lancer dans de grands travaux d’électrification. Le but : fournir de l’électricité à un parc d’usines en pleine transition, et à de futurs arrivants très énergivores. Des travaux complexes pour permettre la transition énergétique.
Site phare de l’Europe industrielle du Nord-Ouest, la région de Dunkerque concentre des enjeux extrêmement forts de transition. Avec 16 millions de tonnes de CO2 émises par an, Dunkerque pèse à elle-seule 5% de la totalité des émissions de la France et 21% des émissions du secteur industriel. En effet, sidérurgie, traitement des métaux, production d’énergie… Ils sont nombreux à être installés dans cette ville des Hauts-de-France.
Si au niveau national, le secteur industriel produit 19,2% des émissions de gaz à effet de serre, Dunkerque et ses alentours cumulent les sites particulièrement polluants, notamment ArcelorMittal et son immense usine sidérurgique, Dunkerque Aluminium et sa fonderie, la plus grande d’Europe, ou encore la compagnie chimique Versalis France. Autant de sites voués à participer au nécessaire effort de décarbonation du secteur industriel français.
De plus, celui-ci s’inscrit dans un contexte général de réindustrialisation du pays, lancé à partir de 2017. 108 000 emplois supplémentaires ont été créés dans les métiers industriels en 2022, et 500 usines de plus ont vu le jour entre 2016 et 2023. C’est cette situation qui fait de Dunkerque aujourd’hui un véritable laboratoire de l’électrification massive. Avec comme objectif d’accueillir de nouveaux industriels et de permettre à ceux qui sont déjà implantés de s’électrifier.
Centrale nucléaire géante pour clients gourmands
Un pari difficile, mais RTE, le gestionnaire du réseau de transport électrique, s’est allié à la Communauté urbaine de Dunkerque pour lancer de grands travaux, à hauteur de 1,5 milliard d’euros d’investissement. Le but : installer quatre lignes 400 000 volts de plus, dont deux enterrées, pour accueillir toute la production d’électricité réalisée par la centrale nucléaire de Gravelines, la plus grande de France. Cette centrale devrait d’ailleurs voir prochainement l’installation de réacteurs EPR2 bien plus performants. Pour gérer toute cette production, un poste électrique de 24 hectares verra également le jour.
Le délégué régional RTE en Hauts-de-France précise auprès des Echos : «Ce n’est pas le projet le plus coûteux que nous avons à déployer, mais c’est de loin le plus complexe. »
En effet, pour mettre au point cette opération il faut attendre que les réacteurs soient en maintenance, afin de ne pas couper le courant, même temporairement, aux usines en fonctionnement. C’est notamment le cas pour Aluminium Dunkerque, premier consommateur d’électricité en France, avec 4 térawatts-heure par an, ce qui représente à peu près la même quantité d’énergie que la ville de Marseille.
Pour ce qui est des usines qui ne sont pas encore installées, là aussi tout est prévu. La décision de ce chantier à venir a été prise dès 2019, et les raccordements seront installés avant même l’arrivée des nouveaux arrivants. Cela se concrétise par la construction de « multiprises géantes », environ 50 pylônes électriques qui prendront place près de l’autoroute A16 entre Dunkerque et Calais avant 2030. Comme le raconte au Figaro Xavier Dairaine, directeur de projet à la communauté urbaine : « Nous avons voulu aller au-delà du site clés en main en proposant aussi l’accès à l’électricité. Pour un industriel, cela représente un gain de temps de trois à quatre ans »
D’abord Dunkerque, puis la France
Avec ces efforts, l’ambition est d’attirer de nouveaux industriels, à l’instar de Verkor et son usine longue comme « dix-huit Notre-Dame de Paris » arrivé en 2022. L’industriel compte embaucher 1 200 personnes, et prévoit déjà une consommation à moyen terme de 220 mégawatts. Sans oublier le mastodonte ArcelorMittal dont l’usine fonctionne avec du charbon. Grâce à un investissement de 1,8 milliard d’euros, intégrant une aide de l’Etat, ArcelorMittal va ainsi remplacer l’un des deux hauts-fourneaux par deux fours électriques.
Dans ce contexte de réindustrialisation et de décarbonation, la demande d’électricité est appelée à augmenter partout en France. Dans ce contexte, RTE est aux premières loges dans l’anticipation des besoins d’électrification. En mars dernier, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité a annoncé un plan de 100 milliards d’euros d’ici 2040 pour développer et moderniser le réseau électrique national. Un investissement massif jugé nécessaire pour supporter toute la production des futurs réacteurs nucléaires, mais aussi des fermes éoliennes en mer et des champs de panneaux solaires.
Toujours selon RTE, la consommation d’électricité en France devrait augmenter de 25% d’ici 2035, notamment dans le secteur de l’industrie. Si cette tendance se confirme, Dunkerque serait véritablement un exemple à suivre pour les évolutions de demain.
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