- Énergies renouvelables
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Les conditions du 100% renouvelable
Selon RTE, les énergies renouvelables ont dépassé les 30% de la consommation totale d’électricité en France en 2023. Hydraulique, éolien, photovoltaïque… toutes ces énergies sont amenées à répondre à une importante partie des besoins en électricité décarbonée, d’ici le milieu du siècle. Mais l’objectif d’un mix énergétique 100% renouvelable est-il souhaitable et réalisable ?
Dans cet épisode, Samuel, journaliste passionné par la transition énergétique interroge plusieurs expert.e.s pour examiner les conditions nécessaires pour que les entreprises, les particuliers et l’état se saisissent pleinement des ENR, dans leurs systèmes énergétiques et électriques..
Quelles sont les avancées technologiques à notre disposition ? Quelle planification énergétique mettre en place? Fabien Renou, rédacteur en chef du moniteur, nous répond.
Fabien Renou
Les ENR vont peser de plus en plus lourd dans le mix énergétique français par deux moyens, de phénomènes. D’abord une électrification du mix énergétique, c’est-à-dire qu’on va passer, il y a une partie de l’usage des énergies fossiles qui va se transférer vers l’électricité ; et au sein de ce mix électrique, les énergies renouvelables sont appelées à jouer un rôle de plus en plus important. Forcément, au final, ça fera une part plus importante. Ça ne sera pas 100 %. Ne vous a pas échappé que la France a fait le choix de relancer un programme nucléaire avec les EPR2, qui commenceront normalement leur livraison 2035, deux relais principaux, même si les sont ENR sont assez variées. Mais les deux leviers principaux de développement des énergies renouvelables en France sont d’abord l’éolien en mer, avec des parcs beaucoup plus grands, avec des puissances installées beaucoup plus importante, des éoliennes plus hautes aussi, etc., avec des vents plus constants aussi. Le potentiel est là, on a une facette maritime qui importante, qui peut tout à fait rendre service de ce point de vue, avec des questions d’acceptabilité mais qui sont quand même beaucoup moins fortes que sur terre, avec en revanche un vrai frein aujourd’hui, qui est le temps de déploiement de ces projets, c’est-à-dire que les projets mettent dix ans avant de sortir d’eau en tout cas, même à se déployer. Il y a vraiment un problème, il y a un vrai sujet d’accélération de ces projets.
L'éolien dont Fabien Renou a parlé, ne suffira pas à lui seul pour répondre aux futurs besoins en énergie renouvelable, d'autant plus que l'implantation d'éolienne prête encore à débat dans certains territoires. Quels autres leviers pouvons-nous actionner?
Fabien Renou
L’autre levier, évidemment, c’est le photovoltaïque, sur lequel on a un modèle complètement différent, qui est un petit peu de panneaux partout. Et là les leviers sont multiples, mais on a évidemment sur un développement possible dans l’agrivoltaïsme dans le monde agricole, qui est encore un peu lent aujourd’hui, qui est un peu compliqué, qui pose d’autres questions, mais qui est un relais. Évidemment, on a des surfaces importantes sur les supermarchés, les centres logistiques, les usines aussi, qui offrent des toitures importantes et qui peuvent permettre assez facilement d’avoir une surface installées importantes. On a aussi des surfaces plus petites sur les maisons individuelles, évidemment, sur les immeubles d’habitation sur les bâtiments publics. Là-dessus, ça crée une autre typologie, c’est-à-dire que c’est moins, par rapport à l’éolien flottant, moins des gros câbles avec des gros transformateurs qu’on a besoin d’installer. C’est plutôt un réseau très fin, un maillage très fin sur tout le territoire pour produire de l’énergie partout finalement. Ça a une vertu, au-delà de son acceptabilité, parce que finalement, les toits sont déjà là, donc qu’ils soient couverts de taule ou de panneaux photovoltaïque, ça ne change pas grand-chose. Ça à une autre vertu, c’est que ça crée beaucoup de résilience, c’est-à-dire que s’il y a un centre de production d’énergie une toiture qui tombe en panne, le réseau ne va pas être perturbé pour autant. Il y a un problème sur un champ d’éolien en mer, à fortiori sur une centrale nucléaire là, ça met en péril l’équilibre national.
Donc davantage d’ENR implique que nous changions notre perception de l'énergie. Les sites de production d'électricité par exemple, en étant plus disséminés sur le territoire, vont davantage se voir. Sommes, nous prêts à l'accepter ?
Fabien Renou
L’intérêt des ENR, c’est leur dissémination sur le territoire, qui a une vertu en termes de résilience, c’est-à-dire qu’une panne ne peut pas remettre en cause l’équilibre du réseau. Qui posent des questions de coût quand même, parce que ça fait un réseau très dense, très maillé, c’est aussi plein de petits réseaux à créer, c’est d’autres travaux assez coûteux au final. ça crée aussi une dernière vertu, selon moi, c’est que ça rapproche le consommateur du producteur, c’est-à-dire que parfois, c’est le même quand on fait de l’auto-consommassions, c’est-à-dire qu’on consomme sa propre énergie, mais où c’est pas loin, c’est-à-dire que même si on est sur des choses qui ne sont pas individuelles avec une ferme photovoltaïque, la sortie d’une ville, par exemple, ça crée un paysage quotidien où on voit l’électricité qui se produit, ce qui n’est pas du tout le cas avec le nucléaire. Si vous n’habitez pas près d’une centrale, vous avez impression que l’électricité tombe du ciel toute seule et qui n’a pas de problème. C’est vrai, c’est quelque chose qui est assez psychologiquement, assez intéressant de dire que l’électricité, on appuie sur un bouton, elle est là, mais on la voit, on ne voit pas d’où elle sort. Avec les ENR, on a ce paysage qui se transforme et on voit non seulement les infrastructures de transport, des pylônes, qui sont pas forcément les choses les plus élégantes du monde, mais qui sont là et qui nous rappellent que l’électricité circule, mais surtout, on la voit être produit aussi, et je trouve que ça crée une relation à l’énergie qui est un peu différente et qui peut sensibiliser le public, aux consommateurs, tout à chacun, vous, moi, sur ce que c’est que produire électricité, sur éventuellement les nuisances que ça implique aussi, peut-être nous rendre plus responsable en fonction notre consommation.
Maxime Haudebourg est le co-fondateur de l'entreprise Osmosun, il raconte la récente et rapide montée en puissance de nouvelles sources d'énergie renouvelable. L'osmose inverse en est une, et sa complémentarité avec l'énergie solaire est particulièrement prometteuse.
Maxime Haudebourg
On a depuis peu des installations qui fonctionne également en France, sur des ports, ou la question de l’eau se pose pour les plaisanciers qui viennent prendre la ressource en eau des habitants locaux. Et quand cette ressource est limitée, c’est le cas en bord de terre, dans certains endroits, à ce moment-là, le dessalement est une solution pour pouvoir approvisionner en eau les plaisanciers qui le souhaitent. Il faut savoir que, dans l’osmose inverse, c’est un procédé très énergivore et c’est souvent ce qui est reproché au dessalement. Et donc c’est un peu la réflexion qu’on a eue: comment limiter notre impact en matière de CO2 d’une part, et comment faire pour qu’économiquement le processus qu’on va développer soit viable et permettre à beaucoup de gens d’avoir accès à l’eau à des conditions intéressantes. L’énergie solaire aujourd’hui permet d’avoir un kilo water produit qui soit très abordable en matière de coût. Cette énergie solaire, elle a une limite, c’est qu’elle n’est pas stockable facilement, même si on peut commencer à le faire dans certains endroits, et il faudra trouver, je pense, que le meilleur mix énergétique possible pour bénéficier de tous les apports gratuits possibles tout en assurant une continuité du réseau électrique et de la production d’électricité. La transition se fera pas-à-pas. Mais la transition, elle ne se fera pas sur un seul type d’énergie je pense que ce sont les mix à venir qui seront les énergies du futur et qui intègreront effectivement un maximum d’énergie de carbone. En 2015, on ne parlait pas de dessalement solaire, ou très peu, et on imaginait que ce n’était même pas trop possible et que c’était pas du tout dans le dans l’air du temps. Et puis, on a vu les choses changer. En dix ans les choses ont changé de manière extraordinaire aujourd’hui, ça devient presque naturel d’intégrer cette notion d’énergie renouvelable dans les réflexions économiques qui se posent autour du système gros consommateurs d’énergie. Et ça, c’est vraiment une évolution qu’on mesure et qu’on voit bien, et les gens sont réceptifs aujourd’hui à cette notion-là. Mais ils y sont d’autant plus réceptifs que cette solution est économiquement rentable et viable. Et ça aussi, ça a changé beaucoup de choses.
C’est terminé pour aujourd’hui !
Abonnez-vous à ce podcast et rendez-vous demain pour la suite de Courant positif, le programme en 21 étapes, qui part à la rencontre de celles et ceux qui font l’électrification des territoires.
Courant Positif est un podcast produit par Rexel, concocté par l’Agence Calliopé et animé par Samuel Belaud.