Décarboner l’industrie : l’exemple du projet « Green Energy »
« Faire de la France un pays pionnier de l’énergie décarbonée ». C’est l’objectif porté par le gouvernement alors que le secteur industriel est à l’origine de 20% des émissions de gaz à effet de serre du pays. Pour parvenir à rendre l’industrie moins dépendante des combustibles fossiles, le projet Green Energy pose d’importants jalons.
L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie), EDF, Suez… Tous ces grands acteurs du secteur énergétique sont réunis derrière une bannière : Green Energy. Un projet transversal à plus de 120 millions d’euros lancé en 2022 et dont l’aboutissement vient tout juste d’être célébré. Son objectif ? Permettre au site français de l’industriel du bois Swiss Krono, situé à Sully-sur-Loire dans le Loiret, de produire plus en polluant moins. C’est depuis ce site de 60 hectares que Swiss Krono fabrique depuis 1988 des équipements en bois à destination du marché français. Il s’agit notamment du seul site en France à fabriquer de l’OSB, des panneaux issus de la compression de plusieurs couches de lamelles de bois.
Jusqu’à présent, ce site majeur de l’industrie lourde du bois consommait énormément de gaz. La faute notamment à ses deux sécheurs haute température, responsables de 70 % de la dépense énergétique de l’usine de Sully-sur-Loire. C’est donc pour casser cette dépendance au gaz que le projet Green Energy a été initié. Concrètement, les deux sécheurs haute température (400°C) ont été remplacés par des sécheurs basse température (120°C).
« Les sécheurs basse-température sont des sécheurs à bande. Les lamelles de bois, de petite taille, sont séchées sur une bande de convoyage traversée d’air chaud, une technologie particulièrement adaptée à la biomasse » explique Swiss Krono. Des équipements ont donc été installés sur place pour mettre au point une chaudière biomasse, ainsi qu’un condenseur de fumées. L’objectif étant de pouvoir utiliser tous les débris issus de la production de bois du site, comme l’écorce ou la poussière, pour pouvoir alimenter la chaudière. La fumée ainsi produite alimentera les deux nouveaux sécheurs à bois.
Gros moyens pour grand enjeu : décarboner l’industrie
Une logique circulaire qui devrait permettre à l’entreprise de nettement diminuer sa consommation en gaz. L’objectif étant à terme que 90 à 95% de celui-ci soit remplacé par de la biomasse.
Le projet Green Energy devrait ainsi permettre d’éviter 35.000 tonnes d’équivalent CO2 par an, ce qui représente plus de 19.000 véhicules thermiques retirés de la circulation. Dans le cadre de Green Energy, Swiss Krono n’est pas seule. La firme a pu compter sur le soutien de Meridiam, une filiale de Suez, qui a apporté du financement et a supervisé le développement du projet, tandis que Dalkia, qui appartient à EDF, est en charge de la gestion opérationnelle. Le financement est également assuré par l’ADEME et l’Etat à travers les dispositifs France Relance et France 2030 qui ont octroyé 20 millions d’euros au projet.
Au global, ce sont plus de 120 millions d’euros qui ont été injectés dans Green Energy. Un investissement à la hauteur de l’enjeu : décarboner l’industrie. Responsable de l’émission de 80 millions de tonnes de CO2 chaque année, ce qui correspond à 20% du total national, le secteur est scruté de près pour espérer atteindre la neutralité carbone en 2050 et se conformer aux objectifs fixés par l’accord de Paris.
A ce titre, le choix d’une chaudière biomasse s’avère être intéressant. Alimenté en bois avec un faible taux d’émission en CO2, ce type d’installation a un bon rendement et permet une grande économie de chauffage. De plus, dans ce cas précis, le combustible est assuré par des rebuts de la production, ce qui réduit énormément le gaspillage.
Un cycle vertueux
Le bilan : une usine qui ne produit quasiment pas de CO2, qui valorise les rebuts issus de sa production, et ce sans aucun ralentissement de son activité. Tout cela va d’ailleurs dans le sens du travail que mène déjà Swiss Krono, notamment dans l’utilisation de bois recyclé pour ses productions.
Cela ne veut pas dire que tout cela se fait sans aucune pollution. La biomasse génère du monoxyde de carbone et des particules fines. Ce qui pose problème, notamment dans les zones les plus peuplées comme la vallée de l’Arve, en Savoie, particulièrement polluée.
Mais ici, l’usine est située dans une région plus isolée, avec du bois brûlé sous forme de graminés, et donc plus « propre » que du bois de chauffage. Et comme elle est alimentée avec les rebuts de production, il n’y a pas d’arbres supplémentaires détruits pour fournir de l’énergie, ce qui va également dans le sens d’un impact global amoindri.
Crédit photo : SWISS KRONO SAS